fibre de verre, mousse de polyuréthane expansé, silicone teinté dans la masse
objet 25 x 27 x 29 cm
n° inv. 02877 / 1 - 9 / 6
 
acquisition 2002

Dans le travail de Cyril Verrier, d'une grande fraicheur, le déplacement, physique ou imaginaire, est central. Qu'il s'agisse de performances ou d'objets, les contextes d'usage sont détournés, voire retournés, pour produire des situations cocasses. Ses œuvres nous plongent souvent dans une forme d'anticipation nostalgique, rappelant le cinéma futuriste du passé, avec une simplicité pas si naïve qu'il n'y paraît. L'artiste s'amuse, mais avec tout le sérieux des enfants, et sa spontanéité n'est qu'apparente, car toutes ses entreprises sont soigneusement préparées par des dessins ou même des story-boards. Son terrain de jeu de prédilection, ce sont les expériences physiques, soit sur des objets, soit dans des contextes donnés, soit avec son propre corps au moyen d'appareils qu'il fabrique tout spécialement. Au milieu des années 90, il imagine par exemple la Jetneva. Il s'agit d'un véhicule farfelu, présenté dans un dispositif identique à ceux du salon de l'auto, c'est-à-dire posé sur de la moquette et accompagné d'un prospectus et d'une vidéo publicitaire, imaginé pour être utilisé par une personne à la fois sur le jet d'eau de Genève. L'artiste teste également dans de petites actions les systèmes de contrôle de sites sous haute surveillance. Dans ce registre, sous le titre de La vie est belle, il actionne en 2002, au salon de l'auto, le klaxon d'une voiture jusqu'à ce qu'il s'en fasse expulser. Plus surprenant, en 2012, en plein plan Vigipirate, à la Gare du Nord à Paris fourmillant alors de militaires armés de mitraillettes, de police, d'agents municipaux et de la RATP, il exécute des performances incongrues à l'aide de sept valises préparées, dans la plus grande indifférence. C'est également son propre corps qu'il va éprouver dans des actions dont les issues sont incertaines. Ainsi, en 2005, il expérimente la lévitation, couché sur des tiges métalliques munies de mini-fusées. Ou en 2013, il s’élève suspendu par des fils, se stabilise presque au plafond, puis écarte les bras, faisant lâcher les fils et entraînant sa chute.

Les neufs casques colorés acquis par le FCAC participent eux aussi de l'humour décalé et critique propre à Cyril Verrier. Ils ne sont pas sans rappeler la série de dessins animés de la fin des années 60 et 70, Les fous du volant, et leur titre original, Wacky Races, « courses délirantes ». Comme toujours, l'artiste opère avec peu, dans une économie qui se situe aux antipodes de la démonstration et de l'emphase. Ici, les casques amplifient les forces diverses auxquelles ils sont soumis, telles que la vitesse, l'apesanteur ou l'arrêt brutal. Ils s'animent ainsi pour suggérer des actions ou des humeurs, qui contredisent leur fonction première de protection. Leur dénomination spécifique éclaire le comique de leur absurdité : casque réceptif (brun), casque joyeux (rouge), casque agressif (noir), casque ventilé (vert), casque perforant déformant (rose), casque à l'arracher (jaune), casque auto choc (bleu), casque sautillant (blanc) et casque classique percutant (orange). Cette mise à distance de l'usage opère dans une forme de renversement poétique qui en appelle à la fantaisie du spectateur. (DD-2021)